J’ai signé un compromis de vente mais je regrette : comment l’annuler ?

Signer un compromis de vente est un engagement majeur. Mais que faire si le doute s’installe et que vous souhaitez faire marche arrière pour votre achat immobilier ? Annuler un compromis de vente immobilier est possible, mais les conditions et les démarches sont strictes. Délai de rétractation, conditions suspensives, accord amiable : quelles sont vos options ? Ce guide vous éclaire.

Le compromis de vente et le délai de rétractation : bien comprendre vos engagements initiaux

Qu’est-ce qu’un compromis de vente exactement ?

Le compromis de vente (parfois nommé « promesse synallagmatique de vente ») est un accord préalable. Le vendeur s’engage à vendre un bien précis à un prix fixé, et l’acheteur s’engage à l’acheter dans ces conditions.

Juridiquement, c’est un accord définitif sur le bien et son prix (selon l’article 1589 du Code civil). Il équivaut à une vente, sauf si des conditions suspensives ne se réalisent pas ou si vous utilisez votre droit de rétractation.

Il se distingue de l’offre d’achat (que vous pouvez retirer avant acceptation) ou la promesse unilatérale de vente (qui engage surtout le vendeur, l’acheteur ayant une option).

Quel est le délai de rétractation une fois le compromis signé ?

L’acheteur non professionnel dispose d’un droit de rétractation légal après la signature du compromis de vente ou de la promesse de vente pour changer d’avis et ce sans justification. En effet, la loi, à travers l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation, accorde à l’acheteur non professionnel dix jours pleins pour se rétracter, sans avoir à donner de raison. 

Le délai démarre le lendemain de la réception du compromis signé, que ce soit par courrier recommandé avec accusé de réception ou en main propre. Tous les jours comptent, même les week-ends et jours fériés. Si le 10ème jour tombe un samedi, dimanche ou jour férié, le délai est prolongé jusqu’au jour ouvrable suivant. Pour exercer ce droit, il faut informer le vendeur par lettre recommandée avec accusé de réception, le cachet de la poste faisant foi de la date. Si vous vous rétractez à temps, le contrat est annulé sans aucune pénalité, et le dépôt de garantie vous est rendu en totalité sous 21 jours après votre rétractation.

Le simple « regret » : un motif suffisant pour annuler après le délai écoulé ?

En général, avoir des regrets, hésiter ou simplement changer d’avis ne suffit pas pour annuler légalement le compromis après le délai de rétractation. Mais parfois, ce « regret » cache un problème découvert tardivement (vice caché, info importante oubliée par le vendeur). Cela pourrait justifier une annulation (on parle de dol ou d’erreur).

C’est important de distinguer : 

  • Un simple regret personnel (qui ne permet pas d’annuler sans frais) 
  • Et une situation où votre accord a été faussé ou une condition clé du contrat n’est pas respectée.

Quelles sont vos options concrètes pour vous désengager une fois le délai de rétractation passé ?

Les conditions suspensives : une porte de sortie conditionnelle

Les conditions suspensives sont des clauses du compromis qui mettent la vente en pause jusqu’à ce que certains événements se produisent ou non. Des exemples courants incluent l’obtention d’un prêt, l’obtention d’un permis de construire définitif, l’absence de surprise d’urbanisme, ou la vente d’un autre bien avant.

Pour la mise en œuvre de ces conditions, l’événement attendu ne doit pas s’être produit dans les temps. Attention, cela ne doit pas être de votre faute, par exemple, si vous n’avez pas fait les démarches pour le prêt comme prévu. 

La condition suspensive d’obtention de prêt est la plus fréquente. Vous devez prouver que vous avez demandé un prêt correspondant à ce qui est écrit dans le compromis (montant, durée, taux max) et que les banques ont refusé. Pour les preuves et la notification, vous devez informer le vendeur et le notaire que la condition n’est pas remplie, en respectant la procédure et les délais du compromis, et en fournissant les preuves, comme les refus de prêt.

L’annulation à l’amiable : est-ce envisageable avec le vendeur ?

Le principe est le suivant : puisque le compromis est un contrat, vous et le vendeur pouvez décider ensemble de l’annuler, ce que l’on appelle un accord mutuel. Le vendeur peut être motivé à accepter pour éviter un procès long et compliqué, pour revendre son bien plus vite, ou pour garder le dépôt de garantie comme compensation, si vous négociez cela. Pour l’approche et la négociation : 

  • Parlez franchement au vendeur ou à son agent immobilier ;
  • Expliquez votre situation ;
  • Proposez une solution, par exemple, laisser le dépôt de garantie contre l’annulation. 

Une formalisation indispensable est requise : tout accord à l’amiable doit être écrit, sous la forme d’un « avenant de résiliation ». Il doit être signé par vous et le vendeur, et dire clairement ce qu’il advient du dépôt de garantie, si vous renoncez à des poursuites, etc.

L’annulation judiciaire : pour quels motifs graves ?

Les vices du consentement (article 1130 et suivants du Code civil) peuvent être une autre raison pour annuler un compromis de vente si vous regrettez :

Vices du consentementDescription
Le dolIl s’agit d’une tromperie du vendeur (mensonges, cachotteries sur un point crucial) pour vous faire signer
L’erreurVous vous êtes trompé sur un élément essentiel du bien ou du vendeur, et cette erreur est excusable et décisive
La violenceOn vous a forcé à signer par une pression physique ou morale
Autres manquements graves du vendeurS’il n’a pas respecté son devoir d’information avant la signature (par exemple, des diagnostics faux ou absents qui auraient changé votre décision ou le prix)

Pour ces vices, il faut aller au tribunal judiciaire. C’est souvent long, cher (avocat, expertises) et le résultat n’est jamais garanti, car c’est le juge qui décide. Vous devez également avoir des preuves claires pour appuyer votre demande (expertises, témoignages, documents). Un avocat spécialisé est indispensable dans ce cas.


Si je me rétracte, quelles conséquences financières et juridiques ?

Si vous vous rétractez dans le délai légal de 10 jours :

  • Vous n’avez pas à vous justifier auprès du vendeur pour utiliser ce droit ;
  • Aucune pénalité financière, pas de frais à payer ;
  • Le vendeur doit vous rendre tout le dépôt de garantie, sous 21 jours maximum après votre rétractation.

Si vous annulez après le délai de rétractation sans motif valable, alors :

  • Vous risquez la perte du dépôt de garantie, car il est généralement conservé par le vendeur en compensation ;
  • La clause pénale du compromis, fixant une indemnité (souvent 10% du prix), peut être appliquée ;
  • Le vendeur peut saisir le juge pour exiger l’application de cette clause, mais le juge a un pouvoir modérateur ;
  • Des dommages et intérêts supplémentaires pourraient être réclamés si le vendeur prouve un préjudice supérieur, bien que cela soit rare.

La marche à suivre pour tenter d’annuler le compromis

Concrètement, voici les étapes clés :

Étape 1 : Examiner scrupuleusement votre compromis de vente

Tout d’abord, relisez bien chaque clause du compromis. Regardez surtout la date de signature, comment notifier votre rétractation (à qui, à quelle adresse), et le délai de rétractation SRU.

Ensuite, repérez bien toutes les conditions suspensives (prêt, permis de construire…), comment elles doivent se réaliser et surtout leurs dates limites. De plus, vérifiez le montant exact du dépôt de garantie que vous avez payé et les conditions de la clause pénale (montant, quand elle s’applique).

Enfin, notez les coordonnées du notaire qui a rédigé l’acte et de celui qui garde le dépôt de garantie (le notaire ou l’agent immobilier).

Étape 2 : Agir rapidement en fonction de votre situation spécifique

Ensuite, adaptez votre action à votre cas :

  • Si vous pensez être encore dans le délai de rétractation SRU de 10 jours : calculez-le bien et préparez vite votre lettre de rétractation. Chaque jour est important.
  • Si une condition suspensive n’est pas remplie et que la date limite approche : rassemblez vite les preuves (refus de prêt, de permis…) et préparez l’information pour le vendeur et le notaire.
  • Si vous êtes hors délai de rétractation et qu’aucune condition suspensive ne peut être utilisée : contactez le vendeur (ou son agent) pour essayer de négocier. Soyez prêt à expliquer pourquoi et à proposer une compensation.
  • Si vous estimez que votre consentement a été vicié (dol, erreur) ou que le vendeur a commis un manquement grave à ses obligations : consultez vite un pro du droit (notaire, avocat en immobilier). Il évaluera vos chances et la meilleure stratégie.

Étape 3 : Formaliser votre démarche d’annulation de manière irréfutable

Puis, assurez-vous de formaliser votre démarche :

  • Pour exercer le droit de rétractation SRU : Envoyez une lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) au vendeur (adresse du compromis) ou au pro désigné (notaire, agent). Gardez bien la preuve de dépôt et l’accusé.
  • Pour invoquer la non-réalisation d’une condition suspensive : Informez le vendeur et le notaire par LRAR. Joignez toutes les preuves que la condition n’est pas remplie sans que ce soit de votre faute, et faites-le avant la date limite du contrat.
  • En cas d’accord amiable : Demandez un écrit signé par tout le monde (vous, le vendeur, l’agent si sa commission est en jeu) : un « avenant de résiliation ». Il doit bien préciser les conditions de l’annulation (dépôt de garantie, abandon de poursuites, etc.).
  • Pour une action en nullité judiciaire : Suivez à la lettre les conseils de votre avocat pour la mise en demeure (si besoin) et pour attaquer le vendeur en justice.

Étape 4 : Assurer le suivi et la communication avec toutes les parties

Enfin, organisez le suivi. Gardez précieusement des copies de tous les courriers (envoyés, reçus), les accusés de réception, les e-mails et toutes les preuves. N’oubliez pas de communiquer par écrit (e-mail avec accusé de lecture, LRAR) pour garder une trace de vos échanges avec le notaire, le vendeur et l’agent.

Il faut obligatoirement que vous restiez calme et factuel, même si c’est tendu. Et enfin, contactez le notaire qui a rédigé le compromis : il doit vous conseiller et peut aider à trouver une solution juste pour tout le monde.

Notre conseil : N’hésitez pas à consulter un avocat spécialisé en immobilier si la situation se complique, si beaucoup d’argent est en jeu, ou si vous ne comprenez pas bien les conséquences légales de vos actions.